8h30. Nous sommes sur le pont. Ou plutôt sur la plage, à Hot  Water Beach, dans la péninsule de Coromandel. On nous a conseillé de venir deux heures avant la marée basse. Après, il y a trop de monde. Hot Water Beach, c’est un lieu magique. Au niveau de l’avancée rocheuse au creux du croissant que dessine la plage, sous le sable, court une source d’eau chaude qui peut atteindre 60° C. A marée basse, ceux qui connaissent l’endroit y creusent une petite piscine, faisant remonter à la surface l’eau délicieusement chaude, et se baignent ainsi face à la mer, ne craignant plus ni l’eau trop fraîche, ni le vent.

Nous nous approchons de l’emplacement où s’activent déjà quelques personnes. Certains ont amené de vraies pelles, d’autres, comme nous, la petite pelle qui fait la paire avec la balayette dans le camping-car de location. D’autres sont venus avec une bouteille coupée en deux. Chacun guette les bulles à la surface du sable, signe que la source est là, puis se met à creuser dans son coin sa piscine personnelle, tentant d’ériger dans le même temps avec le sable un barrage contre le Pacifique. Il faut faire vite, certaines vagues viennent lécher la fragile muraille, l’emportant dans le reflux, et tout est à recommencer. Une fois, deux fois. Alors, sans rien se dire, chacun comprend qu’il vaut mieux unir les forces, creuser une piscine plus grande, ensemble. Quelques minutes seulement, et nous voilà allonger dans un bassin tout en longueur, un sourire béat sur le visage. Quand une vague plus puissante s’essaie à tout détruire, l’un ou l’autre, à tour de rôle, consolide la muraille.

10h30, on est à marée basse. Une horde de postulants à la divine baignade se pointe. Il est temps de lever le camp.

Il est presque 10h30, les nouveaux arrivants se pressent pour se trouver leur petit coin de paradis. Il est temps pour nous de partir…

A quelques kilomètres seulement de Hot Water Beach, Cathedral Cove, un tunnel photogénique dans la roche à fleur de mer.

Une des merveilleuses plages isolées de la péninsule de Coromandel. On n’a pas vraiment envie de dévoiler le nom de l’endroit !

On a un peu hésité à passer par la région de Rotorua, le plateau central de l’île du Nord. D’abord parce qu’avec trois petites semaines pour découvrir cette île, il faut faire des choix. Et puis, avouons-le, les guides décrivent l’endroit comme un incontournable de tout touriste digne de ce nom, et on avait un peu peur de la foule et des parcours trop balisés. Finalement, on a fait un détour par-là, et on ne le regrette pas.

La région regorge de phénomènes géothermiques, et on a jeté notre dévolu sur Wai-O-Tapu. Dans ces 18 km2, les entrailles de la terre se sont déchirées voilà 15 000 ans, et toute la surface en est affectée. Cratères d’où s’échappe une fumée nauséabonde de soufre (pour ceux qui n’ont jamais senti, ça ressemble étrangement à une odeur d’oeuf pourri), chaudrons au fond desquels bouillonne une boue huileuse, cheminées d’où parvient un ronflement grave et menaçant, fumerolles, sources fumantes, geysers. Et il faut faire gaffe où on met les pieds, on frise un peu partout les 100 °C.

Tout cela pourrait être terrifiant s’il n’y avait toutes ces couleurs ! On dirait qu’un artiste a laissé traîner un peu partout ses gouaches, et que les couleurs se sont diluées dans les piscines d’eau et les cavités. Orange, jaune fluo tirant sur le vert, violet, bleu intense… On en oublierait presque l’odeur…

Aux alentours de la rivière Wai-O-Tapu, ça fume…

Antimoine pour la couleur orange, arsenic pour le vert… la classification périodique des éléments est tout de suite plus amusante.

Des panneaux rappellent un peu partout qu’il ne vaut mieux pas sortir du sentier…

Soufre et arsenic donnent à cette piscine ces teintes surréalistes. L’endroit est connu comme le bain du diable.

Oeuf sur le plat ?

Juste pour le plaisir, à nouveau une vue de cette source, nommée la piscine de champagne… à cause des bulles.

De Picton, le ferry nous a donc conduit à Wellington, capitale de la Nouvelle-Zélande. Que vous dire de Wellington ? C’est sûr, c’est une bien jolie ville avec sa promenade qui court sur le front de mer, ses quartiers bien identifiés (dans l’un on bosse, dans l’autre on se biture, dans un autre encore on fait ses courses), ses restos à gogo (on en compte plus par habitant qu’à New York). Mais bon, perso, tout cela ne me met pas en transe. Wellington reste une ville occidentale, peu de surprise à en attendre. On a donc vite repris la route, carte et calendrier en main. Nous avons passé 7 semaines sur l’île du Sud, nous en avons 3 pour celle du Nord. Va falloir se montrer plus… sélectif.

La décision est vite prise de prendre la direction de la côte Est, notamment pour parcourir  la côte entre Gisborne et Whakatane. On a lu que la zone était sauvage, authentique, habitée par des communautés maoris accueillantes. De fait, on est tombés sous le charme de ses baies fouettées par le Pacifique (vraiment mal nommé) et qui se découvrent une à une aux détours des lacets dans les collines verdoyantes. Surtout, on est tombés sous le charme de ces communautés maoris. Leurs saluts chaleureux à chaque coin de route, leurs conseils attentionnés (pour nous aider à trouver un coin tranquille où passer la nuit), leur sérénité… Tout cela explique pourquoi 20 minutes après avoir quitté la baie de Hicks, qui jouxte celle d’Onepoto occupée par une petite communauté, on a fait demi-tour pour y passer encore un peu de temps. Histoire de profiter encore de son ambiance, de sa douceur, de ses couleurs…

Moyen de transport local… Bien plus profilé que nos habituels kayaks (à Hicks Bay)

La (vieille) jetée de Hicks Bay

Vue sur la baie depuis la jetée

Eglise anglicane avec vue imprenable (à Raukokore)

Un Marae, lieu de rassemblement maori (à Waipiro Bay)

Un peu flippant le portail de l’école enfin… seulement si on ne maîtrise pas (comme moi) la mythologie maori (à Torere)

Après 7 semaines sur l’île du Sud et près de 6 500 km parcourus, nous mettons le cap sur l’île du Nord où nous passerons les 3 prochaines semaines.

Notre ferry qui va donc nous conduire de Picton à Wellington

C’était pour nous une première. Nous sommes partis faire du kayak seuls pendant deux jours sans guide. Dans le parc national Abel Tasman. Depuis la terre, c’est une forêt primaire dense. Depuis la mer, une côte déchirée où les rochers affleurent plus ou moins selon la marée, ponctuée de plages paradisiaques orange. A marée basse, la mer y dessine des arabesques de sable. Dans notre paquetage, une précieuse carte des lieux, un tente et nos sacs de couchage, la popote pour les pâtes-tomate-parmesan du soir et quelques habits pour se changer, au cas où il pleuvrait.

Point de pluie à l’horizon, un grand ciel bleu et un peu de vent de face (ça fait les bras et ça rafraîchit). Du coup, comme il y avait du vent, il n’y avait pas de mouches noires piqueuses au camp du soir. Juste le chant des oiseaux, les cris des possums (de petits marsupiaux qui ont envahi le pays) et des millions d’étoiles, points lumineux dans le ciel. Bref, le paradis. Outre les paysages, nous avons retrouvé nos amis les otaries de mer, très nombreuses sur la côte et les petites îles au large. En prime, nous avons découvert une « nurserie » pour petites otaries, dans le renfoncement de l’île Tonga. Et cette fois, ce n’est pas à Cyril qu’elles s’en sont prises… La preuve en vidéo :

Une carte, deux pagaies, trois fois rien, et vogue le kayak.

Sur les rochers se découpe le profil du fier animal marin.

…le sable des plages vire à l’orange (Abel Tasman national park)

… il est facile de camper face à la mer pour ne pas manquer un seul coucher de soleil

…les moules sont vertes (une bonne assiette servie au Mussel Pot à Havelock)

…l’eau de certaines sources est si pure que l’on y voit jusqu’à 60 mètres de profondeur (ici, les sources Te Waikoropupu)

Tout au nord de l’île du Sud, là où l’île se termine par le split de Farewell, se trouve Golden Bay, une baie qui ouvre sur des plages vallonnées par des dunes, des collines vertes aux arbres courbées par le vent et où, à marée basse, la mer part loin, très loin…

Pour cette dernière photo, dédicace à Karo 😉

Ben, tout est dans le titre…
et dans la vidéo 😉

Difficile de l’ignorer vu les affiches qui l’annoncent, Kaikoura c’est en Nouvelle-Zélande « Le » lieu pour rencontrer des dauphins « Dusky ». Pas seulement les dauphins d’ailleurs puisque selon les saisons baleines et orques patrouillent aussi dans le coin. A l’origine de cet embouteillage, un grand canyon sous-marin de 1500 mètres de profondeur qui fait office de garde-manger. Les dauphins donc. On nous avait dit que le meilleur moment pour les voir en pleine activité, c’était le matin. Nous voilà embarqués à 6h30 pour aller à leur rencontre. On pensait devoir patienter une petite heure mais au bout de 15 minutes un premier escadron accompagne le bateau à sa proue, semblant faire la course avec lui. Le pilote ralentit et là, peu à peu, la course cède la place à un ballet. Certains exécutent des saltos arrière, d’autres s’amusent à enchaîner 5 ou 6 sauts. Au bout de quelques minutes, on ne sait plus bien ou regarder. Un vrai show qui va durer une bonne heure. Et un réveil comme on les aime…