Une tente ? Vraiment ?
Avant de partir, on s’est posé cent fois la question : est-ce qu’on embarque une tente ? Une tente, cela veut dire 2 kg minimum (et là, je ne compte même pas les sardines), auxquels il faut rajouter le poids des sacs de couchage et des tapis de sol (on aime bien un peu de confort, quand même). Et une popote et un réchaud aussi (800 g au moins), parce qu’on a beau être des campeurs, on n’en a pas moins des besoins physiologiques comme tout le monde. Et je ne vous parle même pas du volume que tout cela occupe dans les sacs ! Bref, y avait de quoi se poser sérieusement la question. Et puis, on s’est dit que oui, la tente était indispensable. Pourquoi ? C’est justement le titre de cette note, et je vais tenter de répondre à la question :
– D’abord, parce qu’une tente, c’est la liberté absolue. Quand on veut décider chaque jour ce qu’on fera le lendemain, sans réserver, la tente permet d’avoir l’esprit libre. Pas de place dans une, deux, trois auberges ? Le camping municipal vous tend les bras. Ou un camping gratuit un peu plus loin (bon, faut se passer de la douche, mais une fois de temps en temps…), avec sans doute la plus belle vue de la région.
– Ensuite, parce qu’une tente permet de générer des dialogues d’une incroyable richesse au sein du couple : « Tiens, on va la mettre là, c’est plat. » « N’importe quoi, c’est pas plat. Rien que de regarder l’endroit, j’ai le sang qui me monte à la tête et les pieds tout froids. » Ou bien encore : « Il vient du lac, le vent, on va mettre les absides de ce côté. » « Il viendrait pas plutôt du petit bois, ton vent ? » Et je ne donne que ces deux exemples parmi tant d’autres… (note de Cyril : n’empêche que moi j’ai le sens de l’inclinaison…)
– Et puis, en Patagonie, la tente vous donne l’impression non pas de voyager, tout bêtement, mais de vivre une véritable aventure extrême. Exercice n° 1 de l’apprenti aventurier : monter la tente alors que le vent arrive par grosses bourrasques, d’un peu partout parce qu’il tourbillonne. On ne va pas se plaindre, parce qu’à deux c’est mieux quand même. On a vu des solitaires batailler ferme pour planter la leur. Exercice n° 2 : tendre des cordes tout autour pour que le double toit ne s’envole pas. Ajouter des pierres pour stabiliser le tout. Très grosses de préférence. Exercice n° 3 : se mettre à l’abri du vent et essayer de dormir alors que la toile à quelques centimètres de votre nez se tord dans tous les sens, que la structure tout entière est secouée et se soulève, que le vent siffle différentes notes selon l’angle de pénétration entre la tente et le double toit. Il paraît que sur certaines îles où le vent est terrible, il constitue une circonstance atténuante en cas de meurtre, parce que le vent rend fou. On a testé.