Bilan chiffré (ça fait sérieux)

Après dix semaines en Patagonie, on s’est dit avec Cyril qu’il était temps de mettre noir sur blanc quelques chiffres, histoire de passer pour des gens sérieux.

• Bus :
  Nous avons emprunté 11 bus longue distance pour relier les différentes zones dans lesquelles nous avons rayonné. Et passé quelque 120 heures à bord.
• Bateau :
  8 fois, nous avons embarqué. De 20 minutes pour traverser le détroit de Magellan à 8 jours pour découvrir l’Antarctique. On pourrait ajouter aussi une sortie en kayak et une descente de rapides en rafting.
• Voiture :
  4 locations, pour un total d’une quinzaine de jours.
• Camping :
  Nous avons dormi 18 jours sous la tente. Dont 2 nuits sous une pluie continue et 3 jours sous un vent à décorner les boeufs.
• Bières :
  Là, impossible de vous dire combien on en a bu, mais le score est plus qu’honorable. Quant au palmarès des bières les plus descendues, nous avons joué la carte locale : Quilmès en Argentine, Escudo au Chili, et pas mal de petites bières artisanales sur le chemin.
• Incidents répertoriés :
  1 roue crevée, 1 piqûre de bourdon sous la tente (Cyril), 1 paire de chaussettes perdue (Valérie), 1 pantalon achevé (Valérie, lors de la randonnée à Torres del Paine). En fait, on s’en tire bien.

Dernier trajet en bus pour passer une journée à Valparaiso

Valparaiso, ville verticale

Bon, vu la température à Santiago, il était grand temps de se rapprocher de la mer pour se rafraîchir un peu. Direction Valparaiso donc, à 1h30 de bus. La ville se visite aussi bien en bus qu’en ascenseur ou funiculaire pour se hisser aux sommets des collines qui la modèlent. Un jeu de pistes vertical et coloré.

Une ville modelée par les collines

Funiculaire et autres ascenseurs sont bienvenus pour explorer les hauteurs

Ruelles étroites et colorées

Euh… Quelqu’un a le diagramme de ces câbles ?

Santiago, 34 degrés…

Nous voilà donc à Santiago. Une grande ville installée dans une cuvette dessinée par les montagnes environnantes (comme Grenoble nous a dit un Français installé au Chili) avec de larges avenues, un métro moderne (tout propre avec clim intégrée, la RATP devrait venir ici en stage d’observation…), des gens affairés… Bon, on pourrait s’y sentir bien si le thermomètre ne dépassait pas les 30 degrés (34 aujourd’hui…). Ce n’est pas un soleil qu’ils ont les Chiliens, c’est une massue. Un truc qui frappe la tête dès qu’on sort de l’ombre. Heureusement, nos amies chiliennes Susana et Marcela (rencontrées à Torres del Paine) nous ont fait visiter des p’tits coins sympas et… ombragés.

Santiago, encerclé par des montagnes à peine visibles derrière le voile de chaleur

La ville depuis la colline San Cristobal

Un chien dans le même état que moi sous le soleil de plomb de Santiago

Spécialités chiliennes

Une copine chilienne, Susana, nous a répété tout un après-midi qu’on se baladait à Santiago : « Demain, vous allez à Valparaiso. Vous devez absolument manger un chorrillana, c’est vraiment typique de la ville ». Le chorrillana, kèzako ? Ce plat serait né dans un resto de Valparaiso, le Jota Cruz, au début des années 70. Prenez de la viande, faites-la cuire, mélangez-la avec des oignons frits et de l’oeuf, déposez une énorme portion de ce mélange sur une assiette copieusement garnie d’un lit de pommes frites, et vous aurez votre plat typique. Très reconstituant. Sur la photo, il s’agit d’une déclinaison, où la viande a été remplacée par des fruits de mer, saint-jacques, poulpes, crevettes, calamars… Délicieux, mais on cale en arrivant aux frites. Un conseil : commandez-en un pour deux.

Ces derniers jours, il a fait chaud, très chaud au Chili. Ce qui nous a donné l’occasion d’apprécier à sa juste valeur une curiosité chilienne : le mote con huesillo. Rien à voir avec le mate argentin, si ce n’est que ça se boit aussi. Mais très froid. Le mote con huesillo est un nectar de pêche dans le lequel flottent des morceaux de pêche au sirop et au fond duquel on trouve une couche sédimentaire de grains d’orge cuit. On pourrait dire qu’il y a à boire et à manger. D’ailleurs, il est toujours servi avec une cuiller. C’est en fait très rafraîchissant, et parfait pour redonner un d’énergie en milieu d’après-midi.

… Descente en rafting du Trancura

Tout le monde n’a pas forcément envie de gravir un volcan quand il en voit un. Moi, par exemple, ça ne me fait pas fantasmer. Ca ne me bottait pas de grimper en continu pendant 5 heures, avec cinq minutes de pause par-ci par-là. Alors j’ai choisi d’abandonner Cyril à son triste sort de forçat de la côte et d’aller m’éclater (juste au sens figuré, entendons-nous bien) en descendant la rivière Trancura en rafting. Avec des rapides de classe IV, et même V vu les pluies récentes. De quoi se donner un petit frisson. Nos corps délicieusement moulés dans des combinaisons en néoprène, nous embarquons, et la chevauchée fantastique commence.

Le défi : répondre au doigt et à l’oeil à notre capitaine (notre guide), qui enchaîne à toute vitesse les ordres : en position (on s’assoit sur les gros boudins, près à pagayer), en avant (on pagaie avec énergie), arrière à droite (ceux de droite pagaient en arrière pendant que ceux de gauche pagaient en avant), tous au fond (on se recroqueville au fond du bateau en attendant que ça passe), tous à gauche (là, tout le monde se jette à gauche du bateau en évitant de donner un coup de rame à ses petits camarades), tous à droite, stop (enfin une pause) ! Le tout en se prenant des paquets d’eau et en tentant de rester à bord. Je n’ai pas rempli totalement ma mission, puisque, éjectée du bateau, j’ai descendu un classe IV directement dans l’eau, pieds en avant, comme on nous l’avait expliqué. Bref, je me suis bien amusée.

PS : si y a pas de photo (la vignette vient du site de l’agence, vous pouvez cliquer dessus pour vous y rendre) de mes exploits, c’est parce que c’est un sport sérieux où on est un peu occupés avec nos mains tout le temps.

Ciel de Patagonie

Avant de quitter la Patagonie, je voulais vous parler des cieux. Me souviens avoir lu quelque part que les cieux de Patagonie concurrencent ceux des océans. Il est vrai que l’on voit loin, très loin en Patagonie. Il est vrai aussi que les cieux tourmentés de Patagonie sont prodigieusement beaux. Et puis, le ciel en Patagonie réserve aussi de drôles de phénomènes. On reste souvent plusieurs minutes la tête en l’air à tenter de déchiffrer ces mystères.

Des soucoupes aliens cachées dans le ciel de Patagonie ?

Ciel tourmenté au dessus des sept lacs, près de Bariloche

Les 7 lacs, tentative d’exploration

Tous les guides vous le disent : faut pas passer du côté de Bariloche sans parcourir la fameuse route des 7 lacs. Environ 110 kilomètres, de Villa La Angostura à San Martin de Los Andes, qui serpentent entre montagnes et lacs (7 donc). Des excursions proposent une visite express en 1 journée. Comme d’habitude, on avait plutôt envie de prendre notre temps et on a donc loué une voiture pour 3 jours. Tous les guides vous le diront aussi : au Chili il pleut mais en Argentine c’est sec. Ben, nous, ce fut tout le contraire. Bref, sur 3 jours, on a dû faire face à 2 gros jours de pluie. Pas de la bruine. De la bonne grosse averse qui rince tout. Et comme on voulait camper, ça a été un peu… technique. Il a fallu faire des choix tactiques, genre : « on pose la tente sur le sable ou là sur l’herbe ? ». On a opté pour le sable. Bon choix. Le lendemain matin, l’herbe était devenue une piscine olympique dans laquelle attendait sagement la voiture. Bon, on avoue, la dernière nuit, on a rangé la tente (trempée) et on a rejoint une auberge.

Entre les nuages et la pluie, on a tout de même réussi à entrevoir ces lacs et leurs montagnes. On a aussi profité d’un camping dans un coin de nature enchanteur : plage de sable blanc, forêt de coihues (si, si, c’est un arbre) habitée par une grande variété d’oiseaux (des rapaces au pic vert à tête rouge en passant par des moineaux verts dont on n’a pas le nom), des chevaux, des vaches et un gardien fort sympathique. A peine étions-nous arrivés que Valérie a dit : « moi, je dors ici ». J’ai pas cherché à débattre.

Des lacs couleur émeraude

Un rayon de soleil vient éclairer ce vieux bus jaune

Notre camping pour 2 nuits, à mi-chemin de cette route des lacs

Notre ami, le pic-vert à tête rouge que l’on entend (taper les arbres) plus qu’on ne le voit

Sous les nuages… les lacs

Rando du côté de Cerro Catedral

Après un p’tit week-end à Puerto Varas, nous avons donc pris un bus et repassé la frontière pour arriver à Bariloche qui marque grosso modo la limite nord de la Patagonie. Bon, à Bariloche, que peut-on faire ? Manger du chocolat, se faire prendre en photo avec un saint-bernard et s’extasier devant certains bâtiments en forme de chalets suisses. Autant dire qu’on a vite eu envie d’aller prendre l’air des cimes.

Direction donc, le Cerro Catedral et le « refugio Frey » à 1 700 mètres. Pas très haut mais suffisant pour avoir un autre point de vue sur le coin et approcher les sommets environnants. Pour en profiter pleinement, on a décidé de camper près du refuge. Quand on a monté  la tente vers 15h00, l’idée semblait vraiment bonne. Le soleil nous chauffait le dos, le lac au pied du Cerro Catedral était calme. La nuit tombée, changement de décor. On a compris toute l’utilité des murs de pierres érigés pour protéger les tentes. Un vent à décorner les boeufs s’est mis à souffler, un froid glacial nous a enveloppés. Et en levant les yeux vers les cimes on s’est soudain sentis tout petits…

Bariloche, sa statut du général Rocca et, au loin, les montagnes…

Le « refugio Frey » près duquel nous posons la tente

Notre tente, protégée par son mur de pierres, face au Cerro Catedral

Kayak dans le fjord Reloncavi

Parfois, les contraintes se transforment en heureuses surprises. Exemple : on se pointe à la gare routière de Puerto Montt le 7 février pour prendre un ticket de bus pour Bariloche le lendemain. Et là, patatra : de guichet de compagnie en guichet de compagnie, pas moyen de trouver un bus, tout est « completo » pour les deux jours à venir. Léger désappointement. Nous v’là bloqués pour la première fois. On ouvre le Macbook, on regarde les guides, les cartes et on décide donc d’aller patienter à Puerto Varas, à 20 km de là. Un p’tit village très touristique mais encore agréable, pas loin du volcan Osorno. A peine arrivés, la vue du grand lac, du volcan, des montagnes, nous donne des envies de kayak.

Le lendemain, c’est donc journée kayak en petit comité (nous sommes 4 plus le guide). Un sacré bon moment. On commence en douceur, on prend le temps de s’arrêter pour se baigner dans des sources d’eau chaude, on se bagarre avec des vagues un brin agressives histoire de se refaire des bras, on fait la pause déjeuner dans une ferme égarée (pas de voisins à l’horizon…) et on termine par un slalom entre les casiers à moules. On a fini la journée avec une sacrée envie de renouveler l’exercice…

Le kayak, moyen de transport silencieux dans un monde de silence…

Les chevaux n’ont pas lu les horaires des marées…

Une ferme et ses hôtes nous accueillent pour le déjeuner. Pas de voisins immédiats mais ils se rendent en « ville »… une fois par mois.