Je ne voudrais pas faire ma grande gueule, mais y a quand même un moment que j’ai envie de parler d’une catégorie de voyageurs, les photographes, plus spécialement de ceux équipés de reflex aux téléobjectifs qui ressemblent à des bazookas.
Il y a quelques jours, pour nous faire une idée de l’étendue et des beautés du parc Torres del Paine et savoir dans quel coin nous allions randonner, nous avons fait une balade d’une journée avec un gars en camionnette et quelques autres gugusses. Sur les chapeaux de roues, il nous a donné un joli aperçu des lacs, glaciers, monts et montagnes… A midi, près d’un lac, chacun sort son casse-croute, et apparaissent aussitôt des caracaras, sorte d’aigles au bec rouge. Bien sûr, on nous a recommandé de ne pas les nourrir, et notre petit groupe les observent en silence, presque religieusement. Débarquent soudain quatre Américains armés jusqu’aux dents d’appareils photo aux téléobjectifs monstrueux. Ils se jettent ventre à terre dans l’herbe, ignorant complètement les personnes qui regardent juste avec leurs yeux, et qui se retrouvent derrière eux du coup, tentent des approches en rampant ; les oiseaux reculant ils leur jettent des miettes. Et le cirque dure ainsi des plombes.
Alors qu’ils se relèvent, ravis de leurs prises en rafales, je murmure assez fort pour qu’ils puissent entendre : « C’est cool de prendre des aigles à terre en train de picorer des miettes. Vraiment into the wild ! » Je ne sais ce qu’ils en retiendront, et même s’ils ont entendu ou compris, mais ça soulage.